Pour les non-initiés, les Ural se ressemblent tous. Ce sont des side-cars rustiques, des copies des BMW allemandes de la Seconde Guerre Mondiale qui n’ont pas évolués depuis 75 ans. Cette idée fausse se dissipe très rapidement dès qu’on s’intéresse un peu au sujet.
On découvre même une vraie généalogie, avec des évolutions marquées et remarquables. Bien sûr, il ne faut pas s’attendre à des ruptures technologiques mais ça se révèle très intéressant.
Alors je ne vais pas faire l’historique des Ural (et des Dnepr) car de vrais spécialistes le feront bien mieux que moi, mais l’Ural 8.103 qui nous intéresse ici est de 1989 et c’est la dernière évolution avant l’arrivée des capitaux étrangers et la “modernisation” des Ural. Il y avait 2 versions : la 8.103-10, avec une fourche classique, et la 8.103-40, comme ici, avec une solide fourche à balancier. Et pour cette dernière version, niveau look, on est vraiment très proches des Ural du XXIème siècle.
Démarrage
Déjà, une Ural, c’est massif et lourd. On n’est pas sur un petit attelage comme une Royal Enfield. Ici, la moto est grosse, le panier volumineux et l’ensemble pèse 340 kg ! Autant dire qu’il y a de la ferraille. Sans surprise, il ne faut pas s’attendre à une présentation remarquable, avec des fils électriques sans protection, des ajustement hasardeux et du chrome qui rouille. Mais finalement, ça fait parti du charme : russe et rustique !
Dans le panier, pas de fioriture, même si le passager a le droit à un vrai siège à ressorts et une poignée de maintient. Le panier est lui même fixé sur la caisse sur des caoutchoucs. C’est sympa de prendre soin du passager, parce que ça va secouer !
Pour la mise en route, retour dans les années 50 :
- On titille (terme exact) l’arrivée d’essence des 2 carburateurs
- On tire les 2 starters
- Et on kicke gentiment. Pas besoin d’y aller comme un sauvage, ça doit démarrer tout seul en 2 ou 3 coups
Le bicylindre s’ébroue dans un bruit très caractéristiques, proche de celui des Citroën 2cv. L’installation de l’allumage électronique a rendu le démarrage plus simple, le ralenti bien plus stable et évite une légère claudication que je n’arrivais pas à résoudre.
Sur la route
C’est le moment de partir ! Première en bas, les 3 autres vitesses sont au talon. La boite est raide et lente mais toute les vitesses passent correctement.
Aux premiers tours de roues, on est surpris par le roulis naturel de l’engin. Un virage à droite, ça se tasse sur l’arrière en couinant de l’avant et dans les gauches, ça déleste sec de l’arrière, surtout si on est un peu optimiste en entrée de virage. Un Ural, ça se conduit à la cool ! 70-80 km/h, c’est très bien. Plus rapide, le moteur n’aime pas et le pilote non plus.
Niveau freinage, on dit que “rien n’arrête un Ural, pas même ses freins”. Je ne peux que confirmer. Il faut vraiment anticiper mais avec un peu de doigté, ça se passe très bien.
Mais le problème avec l’Ural, c’est que sur la route, on s’enquiquine assez vite. Ça gigote, ça n’avance pas, et se faire doubler par les camions, c’est pas formidable… Mais surtout, on regarde tous les petits chemins de traverse. Parce que ce qu’on a envie de faire avec un Ural, c’est du chemin ! Rouler dans la boue ! Et c’est dans ces conditions que l’Ural révèle toute sa saveur !
Dans les chemins
Un fois parti dans les chemins, on aborde les difficultés sereinement grâce à une belle garde au sol et un moteur qui reprend très bas. D’ailleurs, même quand ça devient un peu gras ou qu’il y a du franchissement, l’absence de la seconde roue motrice ne met pas en difficulté. Je n’ai pas traversé de gros bourbier mais dans le gras, ça passe tout seul. Le moteur, jamais brutal, reprend très bas et permet de garder de l’adhérence. Alors oui, on part souvent en crabe mais ça grimpe partout !
Autre truc impressionnant : la capacité de rouler chargé. Le comportement de l’Ural est très sympa avec 100 kg dans le panier. Bien posé sur ses suspensions, le moteur tracte vaillamment sans montrer d’essoufflement particulier. Il devient encore plus physique sur les freinages et quand le terrain est vraiment cassant mais se balader dans du chemin roulant en duo, c’est très plaisant.
Et la fiabilité alors ?
Si c’est bien marrant de faire le zouave, il faut garder un oeil sur la mécanique. Déjà, la consommation d’huile. Avec le moteur strictement d’origine, la consommation d’huile admise aux 1000 est de 2,5L (indiqué dans le manuel d’atelier !). Entre la conso d’huile et les fuites, sachant que le carter a une contenance de 2L, il faut vraiment surveiller le niveau.
Niveau fiabilité, un vieil Ural va rapidement se patiner. Le traitement des matières n’est pas aux standards de ce qu’on a l’habitude de voir en Europe mais les Ural prennent une jolie patine. Niveau mécanique, il y a un peu de fiabilisation pour éviter quelques ennuis plus tard, surtout si vous voulez voyager. Un peu de temps est à passer sur le moteur et la carburation, pour éviter de se retrouver planter au milieu de nul part. Quelques spécialistes qui se trouvent très facilement sur le web pourront vous accompagner dans la fiabilisation de l’engin.
Plus par retour d’expérience, il faut bien surveiller les serrages, surtout au début. Pour donner un exemple, j’avais contrôlé les serrages des éléments du cadre mais ça n’a pas empêché le cylindre gauche de se desserrer. Heureusement que j’ai eu le droit à un bain de pieds à l’huile pour m’en rendre compte rapidement. Un coup de clé et c’était reparti. Plus rigolo, j’ai aussi paumé le porte paquet dans un chemin après un petit secouage off-road de l’Ural.
Pour conclure
Avoir roulé en Ural est une chouette expérience, avec la découverte d’un side-car rustique, à 1000 lieues des attelages qui se trouvent dans nos contrées. Je pensais que je serais bien plus sensible à ses charmes mais rouler avec cette machine est un art de vivre que je n’ai pas le courage de développer.
Je vais quand même regretter ses capacités off-road. Difficile de trouver un side-car possédant autant ses capacités de franchissements.